En juin 2019, lors de l’adoption de la Loi modifiant le Code des professions, le législateur confiait en exclusivité aux travailleurs sociaux l’activité qui consiste à réaliser l’évaluation psychosociale d’une personne dans le cadre d’une demande d’ouverture d’une tutelle au majeur ou d’homologation d’un mandat de protection. Cette reconnaissance de la compétence des travailleurs sociaux s’appuie sur le fait que ces professionnels sont les mieux préparés, par leur formation, à procéder à l’évaluation approfondie de la situation d’une personne, dans toutes les sphères de sa vie ainsi que de l’environnement dans lequel elle évolue cela dans une perspective d’interrelation et d’inter influence laquelle est bien propre au travail social. Or, l’entrée en vigueur de la Loi modifiant le Code civil, le Code de procédure civile et la Loi sur le curateur public, prévue le 1er novembre 2022, permettra aux travailleurs sociaux qui exercent cette activité à haut risque de préjudice de prendre davantage en compte les forces et les facultés des personnes de façon à limiter le plus possible les entraves à leurs libertés, tout en bénéficiant d’une protection adéquate et mieux adaptée à leurs besoins.
Une activité qui requiert une attention particulière au sein de toutes les directions de l’Ordre
Que soit au niveau de l’admission, des affaires professionnelles, de la formation continue, du syndic, de la discipline ou encore de l’inspection professionnelle, l’entrée en vigueur de cette Loi mobilise l’ensemble des forces vives de l’Ordre afin que tout soit en place pour que les travailleurs sociaux puissent exercer cette activité selon les nouvelles règles du jeu.
C’est le cas à la direction de l’inspection professionnelle, où une attention particulière a toujours été apportée à l’exercice de cette activité qui, ultimement, mène au retrait de certains droits fondamentaux à des personnes devenues inaptes à prendre des décisions éclairées à propos de leur personne ou de leurs biens. La directrice de l’inspection professionnelle, Rosanna D’Orazio, note que « malgré le fait que 97 % des travailleurs sociaux soumis à l’exercice de l’inspection en 2020-2021 répondaient totalement ou de façon satisfaisante aux exigences de leur profession, certaines lacunes ont pu être décelées en lien avec l’activité d’évaluation psychosociale ». Soumis à la pression de leurs employeurs, dans le réseau, certains travailleurs sociaux omettent des étapes importantes pouvant avoir des impacts importants pour l’exercice des droits des personnes concernées. Dans ces cas, ajoute-t-elle, « des mesures d’accompagnement sont prises pour que les travailleurs sociaux concernés soient en mesure de corriger le tir. »
Par ailleurs, les statistiques compilées par le syndic de l’Ordre, Cristian Gagnon, pour l’exercice 2019-2020, révèlent qu’une décision sur quatre, rendue par le conseil de discipline, visait cette activité. Pourtant, les demandes d’enquête adressées au syndic dans ce domaine pour la même période composaient moins de 11 % des demandes d’enquête. Selon M. Gagnon, « cette disproportion suggère que les enquêtes relatives à ce champ de pratique risquent davantage d’aboutir devant le conseil de discipline, comparativement aux autres enquêtes. »
À la direction des Affaires professionnelles, responsable du service d’information et de consultation offert par l’Ordre à ses membres et au public, on note que 108 des 2 298 demandes adressées par des travailleurs sociaux depuis octobre 2020 portaient sur cette activité réservée. Pour Marie-Lyne Roc, T.S., directrice des affaires professionnelle, l’entrée en vigueur de la loi est une occasion à la fois pour l’Ordre que les travailleuses sociales et les travailleurs sociaux de réaffirmer le caractère professionnel de l’activité d’évaluation et de faire valoir ses assises au plan clinique et scientifique. « D’ailleurs, afin de soutenir les travailleuses sociales et les travailleurs sociaux dans l’exercice de l’évaluation psychosociale, outre les activités de formation continue, nous préparons aussi une 3e édition du guide de pratique concernant l’évaluation psychosociale lequel insistera tant sur la nature que la portée de l’activité démontrant par le fait même toute sa complexité. »
À la lumière de ces statistiques et de l’entrée en vigueur prochaine de la Loi 11, Marie-Ève Chartré, directrice des Admissions et de la formation continue, estime que les formations offertes par l’Ordre permettront aux travailleuses sociales et aux travailleurs sociaux de mettre à jour leurs connaissances et leurs compétences pour exercer l’activité. « Il est prévu que ces formations soient obligatoires jusqu’en 2027, soit pour les cinq prochaines années, afin de permettre aux universités d’actualiser leurs formations sur cette activité réservée et de l’inclure à la formation initiale », précise-t-elle.
L’importance d’une formation adéquate pour maintenir à jour ses compétences
Pour le président de l’Ordre, Pierre-Paul Malenfant, T.S., « il est essentiel que les travailleurs sociaux qui pratiquent ou souhaitent pratiquer cette activité à haut risque de préjudice possèdent toutes les compétences nécessaires puisque la mission première de l’Ordre est de voir à la protection du public. C’est particulièrement le cas avec cette activité où des droits fondamentaux de personnes vulnérables sont en jeu. » C’est pourquoi, en lien avec l’entrée en vigueur de la Loi modifiant le Code civil, le Code de procédure civile et la Loi sur le curateur public, l’Ordre offrira aux travailleurs sociaux la formation leur permettant d’exercer cette activité selon les règles de l’art et d’orienter les personnes et leurs familles correctement pour veiller au respect de leurs droits, même et surtout lorsqu’il y a risque d’abus. Il va sans dire que ces formations visent également à faire en sorte que les travailleurs sociaux demeurent des interlocuteurs crédibles auprès du public et des autres professionnels concernés, notamment les médecins et les notaires. Une formation de mise à niveau, pour ceux qui pratiquent déjà cette activité, sera offerte gratuitement. Une formation complète, tenue sur deux jours et demi, sera offerte aux néophytes au coût régulier des formations de l’Ordre. Les détails quant à leur dispensation seront connus prochainement.
En conclusion
Pour plus de détails concernant les modalités de la nouvelle loi modifiant le Code civil, le Code de procédure civile et la Loi sur le curateur public, nous vous invitons à lire attentivement les prochains textes produits par l’Ordre à ce sujet, à vous inscrire à l’Infolettre dédiée à ce sujet et à consulter les fascicules disponibles sur le site du Curateur public du Québec.